La déduction pour épargne de précaution (DEP) est un dispositif fiscal spécifique aux exploitants agricoles. Elle vise à encourager la constitution d’une épargne professionnelle pour faire face aux aléas inhérents à leur activité. Ce dispositif est initialement instauré pour les exercices clos entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2022. Il a été prorogé et modifié à plusieurs reprises, notamment par la Loi de finances pour 2025. Cette dernière apporte des ajustements significatifs.
Objectif de la déduction pour épargne de précaution (DEP)
La DEP permet aux exploitants agricoles soumis à un régime réel d’imposition de déduire une partie de leur bénéfice imposable afin de constituer une épargne professionnelle. Ce dispositif se substitue aux anciens mécanismes de déduction pour investissement (DPI) et déduction pour aléas (DPA). Il offre une plus grande flexibilité. Les exploitants individuels, les Groupements Agricoles d’Exploitation en Commun (GAEC) et les Exploitations Agricoles à Responsabilité Limitée (EARL) peuvent bénéficier de ce régime, à condition de respecter certaines règles liées à la gestion comptable et à l’affectation des montants déduits (« L’article 73 du CGI autorise les exploitants agricoles […] à pratiquer une déduction pour épargne de précaution (DEP) sur leur bénéfice imposable »)
Modifications introduites par la Loi de Finances pour 2025
a) Exonération partielle en cas d’aléas
La principale nouveauté de la Loi de finances pour 2025 réside dans l’exonération partielle de la réintégration des sommes déduites dans certaines situations. Désormais, si les montants déduits sont utilisés pour faire face à des aléas climatiques, sanitaires, environnementaux ou à des calamités agricoles, 30 % de ces sommes réintégrées peuvent être exonérées d’impôt :
1. L’apparition d’un foyer de maladie animale ou végétale ou d’un incident environnemental (Art L. 361-3 CRPM)
- Les dangers zoosanitaires (art L. 221-1 CRPM)
- Les dangers phytosanitaires (art L. 221-1 CRPM). Ex : fièvre aphteuse, brucellose…
2. Les pertes de récoltes ou de cultures résultant d’aléas climatiques
«Doivent remplir les conditions pour ouvrir droit à une indemnisation»
- Soit au titre contrat d’assurance récolte calamités agricoles (article L. 361-4 CRPM)
- Soit au titre de la solidarité nationale (art L. 361-4 A CRPM)
3. Les pertes résultant des calamités agricoles
– Article L. 361-5, 2ème al. CRPM : «Les calamités agricoles sont les dommages résultant de risques, autres que ceux considérés comme assurables dans les conditions prévues au troisième alinéa, d’importance exceptionnelle dus à des variations anormales d’intensité d’un agent naturel climatique, lorsque les moyens techniques de lutte préventive ou curative employés habituellement dans l’agriculture, compte tenu des modes de production considérés, n’ont pu être utilisés ou se sont révélés insuffisants ou inopérants».
A noter : Dans le texte définitif la traçabilité des dépenses est abandonnée. Ainsi seule la justification de dépenses professionnelles est requise. Applicable aux exercices clos en 2024.
b) Conditions de maintien de l’épargne professionnelle
Les exploitants doivent maintenir une épargne professionnelle à hauteur de 50 % minimum des déductions non encore réintégrées. Cette épargne peut être constituée sous forme d’épargne monétaire (inscrite sur un compte courant dédié) ou d’actifs physiques tels que des stocks de fourrage ou d’animaux à rotation lente. Tout manquement à cette obligation entraîne un rappel fiscal majoré des intérêts de retard prévus à l’article 1727 du CGI. (« Cette épargne professionnelle doit être à tout moment au moins égale à 50 % des déductions non encore rapportées sans jamais excéder le montant de ces déductions »)
Calcul et plafonds de la DEP pour 2025
Le montant de la DEP est plafonné chaque année selon deux critères :
- Plafond basé sur le bénéfice imposable :
- Pour 2025, les plafonds actualisés sont définis comme suit :
- 100 % du bénéfice imposable si celui-ci est inférieur à 32 990 € ;
- 32 990 € majorés de 30 % du bénéfice excédant cette limite si le bénéfice est compris entre 32 990 € et 61 092 € ;
- 41 421 € majorés de 20 % pour les bénéfices compris entre 61 092 € et 91 639 € ;
- 47 529 € majorés de 10 % pour les bénéfices compris entre 91 639 € et 122 184 € ;
- 50 585 € pour les bénéfices supérieurs à 122 184 €. (« Pour la détermination des exercices clos à compter du 1er janvier 2025, elle s’élève […] »)
- Pour 2025, les plafonds actualisés sont définis comme suit :
- Plafond basé sur les déductions non encore rapportées :
- Ce plafond est égal à la différence positive entre 150 000 € et le montant des déductions antérieures non encore rapportées.
- Pour les GAEC et EARL, ce plafond est multiplié par le nombre d’associés exploitants, dans la limite de quatre. (« Pour les exploitants individuels, le plafond est égal à la différence positive entre 150 000 € et le montant de ces déductions »)
Utilisation et réintégration des sommes déduites
De plus, les sommes déduites via la DEP doivent être utilisées dans les dix exercices suivants celui au cours duquel elles ont été pratiquées. Elles peuvent servir à couvrir des dépenses professionnelles, à acquérir des immobilisations ou à constituer des stocks. Si elles ne sont pas utilisées dans ce délai, elles sont automatiquement réintégrées au résultat imposable du dixième exercice suivant, avec des intérêts de retard le cas échéant. (« La DEP non utilisée dans le délai prescrit est rapportée au résultat du dixième exercice suivant celui au titre duquel elle a été pratiquée »)
Réglementation européenne des aides de minimis
Ainsi, le bénéfice de la DEP est conditionné au respect des plafonds d’aides de minimis fixés par les règlements européens. Ces plafonds varient selon le secteur d’activité et sont calculés sur une période glissante de trois exercices fiscaux :
- 20 000 € pour l’agriculture ;
- 30 000 € pour la pêche et l’aquaculture ;
- 300 000 € pour les autres activités. (« Le bénéfice de la DEP est subordonné au respect de la réglementation européenne des aides de minimis […] »)
Conclusion
En conclusion, la Loi de finances pour 2025 marque une évolution importante du dispositif de déduction pour épargne de précaution. Elle introduit une exonération partielle en cas d’aléas, tout en maintenant les règles de plafonnement et d’utilisation. Ceci renforce l’attractivité de la DEP pour les exploitants agricoles soucieux de se protéger contre les imprévus tout en optimisant leur fiscalité. Les exploitants doivent cependant rester vigilants quant au respect des conditions d’éligibilité et des obligations comptables associées à ce dispositif.
Votre comptable Cerfrance Alliance Centre reste à votre disposition pour toute information complémentaire.
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