Près des 3/4 des surfaces agricoles françaises n’ont aucune assurance récolte. La gestion des risques climatiques prend tout son sens depuis plusieurs années. La France et l’Europe en font alors une de leurs priorités et souhaitent la traduire dans la réforme de la PAC.
Le constat
La couverture des risques climatiques est assurée par deux systèmes :
- La garantie des calamités agricoles, la solidarité nationale (ou Fonds de Solidarité Nationale, FSN) ;
- Le système d’assurance privée.
Les exploitations sont de plus en plus exposées et vulnérables face aux aléas climatiques. Les professionnels font pourtant assez peu appel au système d’assurance et les assureurs n’équilibrent pas leurs comptes sur ce type de risques. Le système d’assurance récolte en place à ce jour marque donc ses limites.
Toutes les cultures ne peuvent bénéficier du régime des calamités agricoles. En effet, la viticulture et les grandes cultures en sont exclues dans la PAC 2023, puisqu’elles bénéficient d’une assurance récolte.
Conséquences et décisions
Avec la loi, l’État veut inciter les producteurs à s’assurer pour garantir production et donc leur revenus, et répartir les risques entre les acteurs (privé/public). C’est l’esprit de la loi (1).
A partir du 1er janvier 2023, toutes les pertes sur toutes les récoltes pourront être indemnisées à concurrence de 45%, au delà de la franchise (autour de 30% en arbo et prairies, autour de 50% en grandes cultures et viti).
Les arbitrages européens qui devront être respectés dans le plan stratégique national abordent la gestion du risque :
- Possibilité de consacrer jusqu’à 3% du 1er pilier à un outil d’assurance ;
- Dans la PAC 2023, la France veut renforcer les aides à l’assurance récolte avec un taux de subvention de 70 % et un seuil de franchise à 20 % (2).
Projet de réforme française du système d’assurance récolte et PAC 2023
Les textes actuels proposent trois niveaux d’indemnisation, selon le préjudice subi :
- Les pertes inférieures à 20 % seraient à la charge des agriculteurs via l’épargne de précaution, par exemple ;
- Une assurance récolte volontaire pour couvrir les pertes de 20 à 50 %. La France l’encourage sur la base des propositions ci-dessus ;
- Un dispositif public de type fonds de calamités rénové pourrait alors indemniser les pertes supérieures à 50 %. Ce fonds pourrait être quasi gratuit pour les agriculteurs sur la base de solidarité nationale. Ses modalités en restent à définir.
L’appel à la solidarité nationale est justifié par la montée des exigences sociétales. Celles-ci imposent une transformation rapide des méthodes de production. Par ailleurs, la filière agricole est incapable de supporter, seule, cette transition.
Concrètement, que faire ?
Chaque agriculteur devra désigner l’assureur qui deviendra l’interlocuteur unique entre lui et l’État, en cas de déclenchement des garanties du fonds de calamités agricoles.
En parallèle, et au plus tard en janvier 2023, les agriculteurs devront décider s’ils se limitent à la garantie d’État ou s’ils souhaitent augmenter leurs garanties.
EXEMPLE Cas d’une perte de 70% en grandes cultures : 1) agriculteur ayant souscrit une assurance avec une franchise à 25%, il sera indemnisé de 45% du capital (c’est-à-dire 70% de perte moins 25% de franchise = 45% d’indemnisation) ; 2) Si l’agriculteur n’est pas assuré, il sera indemnisé de 9% du capital (c’est-à-dire 70% des pertes moins 50% de franchise = 20% de quotité indemnisable, au taux de 45% offert par les pouvoirs publics, soit 9% du capital). |
Commentaire et analyse
Sans une réforme rapide, le coût de l’assurance récolte augmentera, la rendant de plus en plus inaccessible pour les agriculteurs. La garantie multirisque climatique devrait alors être assurée par d’autres contrats…
A l’inverse, une réforme conduite sur les bases du rapport remis au ministre permettrait, avec une franchise réduite, de baisser significativement le coût de cette assurance. Cela pourrait alors la rendre attractive pour atteindre 60 % des surfaces françaises assurées.
De plus, le ministère réfléchit à adosser l’assurance récolte à la DEP (épargne de précaution). Cela pourrait prendre la forme d’un relèvement du plafond déductible. L’hypothèse avancée est de le porter à 50 000 € contre 27 000 € pour un non assuré.
(1) Référence : loi n°2022-298 du 2 mars 2022, JORF du 3 mars – (2) Subvention maximum autorisée par l’UE de 70 % et franchise de 20 % contre une subvention de 0 à 65 % et une franchise de 0 à 30 %, actuellement.
Article précédent
Article suivant