Un contrat de prêt à usage avec un voisin est reconduit d’année en année et pourrait bientôt dépasser trente ans de prêt ininterrompu. Le propriétaire ne risque t’il pas de se voir dessaisi de son bien par suite de prescription ?
Rappel du code civil
Le droit d’acquérir un bien par l’usage répété et ininterrompu ne peut pas être exercé par le titulaire d’un contrat, bail, prêt ou autre entente formelle. Ainsi, le titulaire d’un prêt à usage ne peut se prévaloir du droit de propriété à l’échéance d’une période de trente ans.
Le prêt à usage
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette pratique relève du code civil (c. civ. art. 1875). « Le prêt à usage est un contrat [dans] lequel l’une des parties [confie] une chose à l’autre pour s’en servir, à charge [pour] le preneur de la rendre après s’en être servi. » Par conséquent, ce prêt est gratuit et le prêteur reste le propriétaire de la « chose ».
Par principe, cet engagement suit les héritiers, de l’un et de l’autre, sauf s’il en a été convenu autrement. De plus, toute chose peut faire l’objet d’un « prêt à usage », sauf s’il se consomme par son utilisation.
Application pratique, le prêt à usage d’une parcelle de terre
Une parcelle de terre peut faire l’objet d’un prêt à usage. Par nature, il confère un droit précaire à l’emprunteur. La prudence recommande de formaliser l’accord par un écrit, au minimum sous seing privé.
Par conséquent, la détention ou l’utilisation d’un bien ne confère aucun droit sur la propriété au détenteur précaire. Le code dit qu’il « ne produit aucun effet acquisitif« , même après trente ans d’usage.
A l’opposé, le prêt à usage présente un certain intérêt pour l’agriculture. Il permet à un agriculteur d’adapter sa surface au gré des marchés qu’il peut obtenir et donc assurer la production correspondante. Les cultures hautement spéculatives peuvent faire l’objet de tels arrangements.
Et le commodat ?
Le commodat est un contrat de prêt (gratuit) par lequel l’emprunteur s’engage à restituer la chose, objet du prêt. Depuis la loi du 12 mai 2009, le terme de commodat n’est plus utilisé. Il est remplacé par celui de prêt à usage. Le commodataire (l’emprunteur) est responsable de la chose qui lui a été prêtée et il se doit de la restituer au terme de l’engagement.
La vente d’herbe
Elle est encadrée par le Code rural et de la pêche maritime (L. 411-1). Ainsi, « toute cession exclusive des fruits de l’exploitation […] est réputée être un bail rural« .
Le propriétaire qui ne souhaite pas louer sa terre peut être tenté par cette formule. Mais les juges peuvent requalifier la « vente d’herbe » en bail rural. En effet, elle relève du statut du fermage si elle est consentie chaque année au même agriculteur. Et cela, même si le propriétaire paie les cotisations sociales. De plus, l’administration fiscale considère qu’il s’agit d’un mode d’exploitation et impose le propriétaire sur le résultat dégagé.
En pratique, cette présomption existe dès lors que le fait se répète pendant plus de deux ans (de suite) avec le même agriculteur.
Pour annuler toute contestation, le propriétaire devra prouver :
- qu’il s’agit d’une opération isolée ;
- que cet arrangement a été réalisé de bonne foi (sans volonté d’échapper au statut du fermage).
Conclusion, le propriétaire d’un bien prêté, en reste le propriétaire
Article 2266 du code civil. Il réglemente la prescription qui permet d’acquérir un bien. L’article date de 1804
Si le véritable propriétaire a eu son domicile en différents temps, dans le ressort et hors du ressort, il faut, pour compléter la prescription, ajouter à ce qui manque aux dix ans de présence, un nombre d’années d’absence double de celui qui manque, pour compléter les dix ans de présence.
Il a été créé par la Loi 1804-03-15 promulguée le 25 mars
Ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais par quelque laps de temps que ce soit. Ainsi, le locataire, le dépositaire, l’usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent le prescrire.
Version en vigueur depuis le 19 juin 2008
L’article 711 du code civil stipule que « La propriété des biens s’acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l’effet des obligations. » L’article suivant (art. 712) ajoute : « La propriété s’acquiert aussi par accession ou incorporation, et par prescription. » Il en découle que le droit d’acquérir par l’usage ne peut pas être invoqué en cas de détention d’un bien en vertu d’un contrat tel qu’un bail ou un prêt à usage.
Le saviez-vous ? Le prêt à usage, c’est pour « un » usage
En vertu d’un prêt à usage, l’emprunteur doit conserver la chose en bon état et ne l’utiliser que ce pourquoi elle lui a été prêtée. Ainsi, en empruntant une parcelle pour y implanter une culture, vous ne pouvez pas y garer du matériel. Vous ne pouvez donc pas non plus y installer un parc à moutons ni, encore moins, l’aménager pour un stockage de caravanes.
Une parcelle de terre peut faire l’objet d’un prêt à usage. Spécialement pour faire face à une surcroît de production. On pense, notamment, au maraîchage. Mais le prêt à usage est quelques fois utilisé pour des parcelles de très petite taille, enclavées, situées en zone urbanisable ou en cas d’incertitude de la part du propriétaire.
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