L’administration peut soupçonner un travail dissimulé lorsqu’un employeur ne déclare pas l’activité de son épouse, sous couvert de bénévolat ou d’entraide familiale.
Dans un arrêt du 26 mai 2021, la cour de cassation s’est prononcée sur un cas assez particulier. En effet, le professionnel et son épouse se prévalaient de l’entraide familiale pour justifier des heures supplémentaires non rémunérées. La caisse d’assurance sociale ne l’entendait pas ainsi et réclamait le paiement des cotisations sociales sur ces heures.
Les faits
L’épouse d’un travailleur indépendant était salariée sur l’entreprise en vertu d’un contrat de travail pour 30 heures hebdomadaires.
Or, elle effectuait régulièrement des heures supplémentaires au-delà de cette limite. Et cela, sans que son employeur (mari) ne les déclare, ni n’acquitte de cotisations sociales. L’épouse considérait qu’il s’agissait d’entraide familiale ou de bénévolat. Et ne réclamait donc aucun paiement pour ces heures.
Pour la petite histoire, la femme de l’exploitant avait admis travailler régulièrement du lundi au dimanche de 6 h00 à 14h00… Implicitement, elle reconnaissait donc effectuer presque le double d’heures prévues dans son contrat.
Les étapes judiciaires
Suite à la plainte de l’URSSAF, le travailleur indépendant avait été condamné pour travail dissimulé. L’URSSAF déposait un recours en cour d’Appel qui avait disculpé l’exploitant. En effet, la cour considérait que les heures supplémentaires effectuées mais non payées (donc non portées sur le bulletin de salarie), relevaient de l’entraide familiale.
De plus, le juge considérant le couple, soulignait que les époux sont liés par une « communauté de vie et d’intérêts ». Le travail supplémentaire fourni traduisait donc l’intérêt manifeste dans « la bonne marche d’une petite entreprise familiale ».
Le tribunal énonçait enfin que l’épouse ne revendiquant aucune rémunération, l’URSSAF ne saurait demander le versement de cotisations.
Mais l’URSSAF a réitéré et porté l’affaire en Cassation
Position de la cour de cassation sur le travail dissimulé
Celle-ci rappelle tout d’abord que l’épouse est avant tout, salariée. Ainsi et par son contrat de travail, elle est placée sous l’autorité de l’employeur, tout mari qu’il soit. Le lien de subordination prime sur toute autre considération.
De ce fait, la cour exclut toute poursuite d’une activité professionnelle de quelque manière que ce soit. Et par conséquent, la salariée ne peut pas se prévaloir de la notion d’entraide ou du bénévolat.
La cour conclut ensuite qu’un contrat de travail donne lieu à déclaration de toutes les heures effectuées et donc au paiement des cotisations sociales qui sont liées.
La cour de cassation casse le jugement de la cour d’appel. Et l’affaire sera ainsi rejugée.
Travail dissimulé ou entraide familiale ?
Il ressort de ce jugement que le fait de mentionner sur un bulletin de salaire un nombre d’heures inférieur à la réalité constitue une faute. Cela caractérise le délit de travail dissimulé.
La seule exception serait qu’une convention ou un accord collectif d’aménagement du temps de travail en décide autrement (1).
De plus, l’activité des parents, enfants ou amis dans le cadre d’une relation contractuelle (contrat de travail) entraîne un lien de subordination. De ce fait, tout travail non rémunéré peut être considéré comme un travail dissimulé (2).
(1) c. trav. art. L. 8221-5, 2° – (2) cass. crim. 22 octobre 2002, n° 02-81859, B. crim. n° 192 ; cass. civ., 2e ch., 9 mars 2017, n° 16-10117 D
Publié 19 juillet 2021, mis à jour septembre 2022 – Référence : Cass. crim. 26 mai 2021, n° 20-85118 FP
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