Dans un contexte climatique très particulier, l’année 2019 s’inscrit dans une tendance lourde qui s’affirme depuis plus de 10 ans. Les résultats des exploitations de la Nièvre ont été présentés lundi 25 novembre, au public et à la presse.

Conditions climatiques atypiques

Les conditions sèches de la fin d’été et de l’automne 2018 n’ont pas permis de pratiquer les « faux semis » et les désherbages mécaniques. Les conditions climatiques pour la levée des semis d’automne ont été médiocres, suivies d’une longue séquence de températures douces jusqu’en mai 2019. Les températures sont restées inférieures aux moyennes habituelles et le mois de juin a vu la sécheresse s’installer pendant 4 mois.

Rendements 2019, année de contrastes

Alors que les rendements du blé tendre atteignent des records (7,1 t/ha, soit 0,8 T/ha au-dessus de la moyenne décennale), ceux du colza sont au plus bas. Le rendement moyen est au plus bas sur les 20 dernières années (1,8 t/ha alors que la moyenne sur 20 ans est juste inférieure à 3,0 t/ha).

En orge d’hiver, c’est une bonne année, meilleure que 2018 sans battre de record (6,7 T/ha, soit 0,6 T/ha de plus que la moyenne décennale). L’année est médiocre pour le tournesol et très mauvaise pour le maïs qui ont plus pâti de la sécheresse estivale qu’en 2018.

Coté élevage, la sécheresse d’été et d’automne 2018 a plus perturbé la production en 2019 qu’en 2018 : recul du nombre de veaux produit et moindres croissances. L’effet sur les prix a été limité ; il s’est surtout manifesté pour les broutards suite à la sécheresse de l’été 2019.

Côté cours

Sur le plan des prix de vente, 2019 marque le retour au niveau de 2017, après l’amélioration des céréales de 2018. Cela se traduit par un recul de 10 à 30 €/T pour les céréales alors qu’il y a une légère progression, 10 €/T, pour les oléagineux.

Les cours des bovins viande ont plafonné en 2013. Ils ont baissé progressivement jusqu’en 2016 : en 3 ans, ils ont perdu environ 8 % en maigre et 12 % en gras. Depuis, les prix du maigre se sont maintenus voire ont remonté pour les plus jeunes alors que ceux des femelles grasses ont perdu encore 5 % en 2018 pour ne reprendre que 2 % en 2019.

Le lait a ses cours en « dents de scie » depuis 10 ans. Il a atteint son plus haut niveau en 2014, avant de perdre 22 % en 2 ans ; sa remontée a été significative en 2017 et s’est prolongée plus modérément ensuite : en 2019, il est supérieur de 3 % à ce qu’il était en 2018

Évolution des achats

Après plusieurs années de baisse du prix des « appros », la tendance s’est inversée en 2018 :

Les prix sont remontés depuis 2017 pour les carburants. C’est également le cas pour les engrais en 2018, bien que la hausse soit plus modérée en 2019.

Les volumes d’achats ont globalement augmenté avec, en particulier, une hausse des achats d’aliments (1er semestre 2019), suite aux conditions climatiques. Le poste « semences » a également augmenté avec les modifications d’assolement.

Les deux postes liés au revenu, charges sociales exploitant, fermages, suivent la variation des revenus de 2017 et de 2018.

Globalement, les charges remontent de façon limitée, hormis les semences et les aliments.

Les résultats des exploitations, par système

Les exploitations consacrées aux « grandes cultures » (céréales, colza, …) voient le résultat courant baisser de 80 €/ha en moyenne. L’équation est complexe ; plus de rendement en blé, moins en colza, maintien du volume des aides, cours des denrées en maintien, … Ainsi, le résultat par « travailleur familial » est en moyenne de 6 000 € pour l’année.

Les exploitations d’élevage voient leur revenu poursuivre sa lente dégradation. La sécheresse de 2018 est un aléa de plus pour ce système qui n’a toujours pas réussi à surmonter la baisse des performances économiques.

Les exploitations agricoles mixtes, combinant cultures végétales et élevage (1) subissent conjoncture céréalière et conjoncture bovine. L’un compense l’autre. Mais cette moyenne masque les disparités entre systèmes. Les exploitations qui mènent les animaux en « système maigre » et celles qui pratiquent le « tout gras » affichent un résultat courant par travailleur familial (RC/UTAF) de quelques milliers d’euros pour l’année. Les élevages orientés vers l’engraissement des animaux femelles ont un RC par UTAF de 11 000 euros pour l’année.

Avis de notre spécialiste sur les résultats 2019 des exploitations

Dans l’ensemble, 2019 est une année très morose.

Derrière ces moyennes générales, d’importantes disparités se cachent et elles masquent les marges de manœuvre individuelles.

Il y a plus de différences d’une exploitation à l’autre, au sein d’un même système, qu’entre systèmes. Pour en juger, on compare les 20 % d’exploitations les plus performantes et les 20 % d’exploitations les moins performantes. A orientation et taille équivalentes, il y a de 300 à 600 €/ha d’écart de revenu entre elles.

Les causes sont multiples. Mais dans tous les systèmes, la rentabilité reposera toujours sur la maîtrise des facteurs « intrinsèques » de l’exploitation. Cela est indépendant de la conjoncture. Les piliers principaux sont l’organisation du travail, la maîtrise de son métier « métier » et l’optimisation réglementaire.

Le calcul et l’examen des coûts de revient permet d’identifier dans quelle proportion chaque facteur jouera.

D’après un document interne rédigé par N. Roche, responsable études et références, Cerfrance Alliance Centre. Novembre 2019

(1) Système qualifié de « polyculture élevage ».