Le 20 mai 2020, le Préfet du Cher a réuni autour de lui tous les acteurs de la filière viticole. Les pouvoirs publics, les élus, les inter pro, mais aussi les banques, les assureurs, la DDFiP, les organismes sociaux et Cerfrance Alliance Centre avaient répondu à cette invitation.

Outre les effets de la crise liée à la propagation du virus covid-19, le secteur subit encore les conséquences d’obstacles mis en place par la Grande Bretagne, les États-Unis et, pour nombre de viticulteurs, les conséquences de gels tardifs.

L’État met en place un plan face aux difficultés de la filière vins ; mais il manque d’attrait

Les grandes mesures du plan déployé par le Gouvernement s’appliquent au secteur du vin et de la vigne ; prêt garanti par l’Etat (PGE), fonds de solidarité, report de charges, chômage partiel, … Le plan de soutien prévoit également une exonération de charges pour les entreprises les plus en difficulté.

L’État a annoncé les mesures spécifiques au premier rang desquelles figure le dispositif de distillation de crise de 140 millions d’euros. Il n’est pas applicable aux exploitations viticoles du Cher et du Centre Loire, eu égard au décalage de prix.

En parallèle, l’Union Européenne étudie le soutien des entreprises qui subissent les mesures de taxation américaines.

L’inquiétude des producteurs est grande dans une conjoncture de « sur stocks »

Certes, et contrairement à de nombreux commerçants et artisans, si le chiffres d’affaires a fortement chuté (on estime que la baisse totale pourrait atteindre 35% en 2020), le produit est là. Mais, stocké aujourd’hui, il peut perdre de sa valeur marchande. Tout dépendra de l’évolution de la conjoncture. La baisse de consommation pourra avoir comme conséquence une baisse des prix, tant à l’export que sur le marché intérieur. La première difficulté est de pouvoir retrouver ses marchés. La seconde complication est le stockage des vins ; « il faudra faire de la place pour le millésime 2020 », résument de nombreux viticulteurs.

En corollaire de ces écueils c’est la capacité des marchés HCR (hôtels, cafés, restaurants) à revenir sur l’achat, alors que leurs stocks n’ont pas été écoulés d’une manière « normale ». Il faut aussi intégrer les possibles défaillances économiques de certains établissements. Cela priverait la filière de débouchés pourtant bien établis.

Situation des exploitations viticoles du Cher

Les viticulteurs du Centre Loire, et en particulier ceux du Cher, ont beaucoup investi ces dernières années pour faire monter la qualité de leurs produits. Les vins du Centre Loire ont reconquis progressivement leur place et ils jouissent d’une bonne image auprès des consommateurs, y compris à l’export.

Ainsi, les données économiques de Cerfrance Alliance Centre présentées lors de la réunion du 10 mai 2020, montrent que le taux d’endettement s’établit entre 46% (Sancerre) et 95% (Châteaumeillant). Il est de 47% pour les exploitations du Quincy et Reuilly et de 54% pour les Menetou-Salon. Le capital d’exploitation moyen est de 84 500 €/ha de vigne en Sancerre, contre 33 500 €/ha de vigne pour l’appellation Châteaumeillant.

L’emploi direct est aussi sous surveillance. Selon l’interprofession, les exploitations du Centre-Loire cumulent 2 000 emplois directs, soit une moyenne par exploitation allant de 0,5 à plus de 3.

A noter : l’emploi familial est en moyenne de 1 à 1,50 sur ces mêmes exploitations.

De plus, l’activité partielle est peu applicable au secteur de la vigne, comme à celui des productions agricoles en général.

Les viticulteurs demandent un allègement de la conjoncture réglementaire

L’activité se poursuit, même si la difficulté concerne la vente. Les viticulteurs anticipent une récolte précoce en 2020, sans pouvoir pour autant parler d’un phénomène de fonds. En fait, il existe peu de statistiques fiables sur le long terme concernant la date de démarrage des vendanges. La raison en est simple ; l’informatisation est relativement récente et ces données étaient peu collectées par les organismes techniques.

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Quoi qu’il en soit, le risque de sur-stockage est grand et les viticulteurs demandent à pouvoir utiliser toutes les solutions qui s’offrent à eux. A commencer par le stockage « hors du domaine d’exploitation ». Cette stratégie consiste à « constituer des stocks pour lisser les risques et assurer des débouchés commerciaux tout en valorisant les meilleures années », expliquent les professionnels de la filière.

Les solutions reposeront sur une combinaison de plusieurs dispositions

Pour cela, ils demandent aux pouvoirs publics, en premier lieu au service des Douanes, de faire preuve de flexibilité pour permettre le stockage en dehors. Cette procédure existe déjà avec deux possibilités selon la durée de stockage. Sur une courte durée (moins de 6 mois), il n’y a pas d’impact sur la « caution d’accises ». Mais il faut rester attentif au transfert de la responsabilité et des risques liés au stockage. Pour un stockage dépassant 6 mois, le viticulteur déclarera le nouveau lieu de stockage auprès des Douanes. Le montant de la caution sera alors ajusté ; cela peut représenter un frein pour certaines exploitations.

Il faudra aussi mettre en place, avec les banques, un soutien adapté de la trésorerie cohérente avec la conjoncture de chaque exploitation. Celles-ci sont favorables à des prêts spécifiques amortissables jusqu’à 5 ans pour « surmonter » les effets de cette crise de 2020.

Les services de la DDFiP ont précisé que les dispositifs généraux s’appliquent au secteur viticole. C’est le cas en particulier de l’étalement des dettes fiscales, comme la TVA.

La DIRECCTE quant à elle, a rappelé que les conditions de l’entraide familiale sont clairement définies. Cette entraide s’adresse exclusivement aux ascendants/descendants et ne doit avoir aucune contrepartie financière. On craint particulièrement la requalification en « travail non déclaré » s’il était établi un lien de subordination.

Enfin, les professionnels demandent un fond de compensation pour les petits vignobles concernés par les effets du « Brexit » et la conjoncture défavorable des taxes douanières aux Etats-Unis.