Le preneur qui participe indirectement au financement des dépenses de reconstruction du bien loué en payant les primes d’assurance qu’il a contractée a le droit d’être indemnisé en sortie de ferme.
La situation
Lorsqu’un bâtiment compris dans un bail est détruit par cas fortuit, le bailleur peut être tenu de le reconstruire ou de reconstruire un bâtiment équivalent (C. rur., art. L. 411-30, II). L’étendue de l’obligation de reconstruction du bailleur est toutefois limitée. En effet, la loi n’oblige pas le bailleur à s’engager financièrement au-delà des sommes versées par l’assureur.
Le preneur peut cependant décider de participer au financement des travaux de reconstruction. Le cas échéant, la loi assimile cette opération à une amélioration réalisée sur le fonds loué. A l’expiration du bail, le preneur sortant a ainsi droit à une indemnité calculée en application des articles L. 411-69 à L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime (C. rur., art. L. 411-30, III).
Le montant de l’indemnisation
Ainsi, en cas de reconstruction d’un bâtiment détruit par cas fortuit, l’indemnité due au preneur sortant est égale au coût des travaux évalué à la date d’expiration du bail, réduit de 6 % par année écoulée depuis leur exécution (C. rur., art. L. 411-71, 1°). L’amortissement des travaux dont il s’agit a donc, en principe, une durée de 16 ans et 8 mois, sauf s’il existe une table d’amortissement différente arrêtée par le préfet dans le département concerné (C. rur., art. R. 411-19).
Cette indemnisation du preneur sortant trouve à s’appliquer dans tous les cas où le preneur a participé, de manière directe ou indirecte, au financement des dépenses de reconstruction du bien loué détruit par cas fortuit. Il en est ainsi, notamment, lorsque le preneur a payé les primes d’assurance qui ont permis au bailleur de percevoir l’indemnité due par l’assureur en raison du sinistre survenu. Telle est la solution que consacre, pour la première fois, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation dans une décision du 5 novembre 2015.
Confirmation par la juridiction
En l’espèce, un bâtiment à usage d’habitation, qui a été loué avec diverses parcelles de terre par bail à ferme à un agriculteur, est détruit par un sinistre. Le bâtiment en cause est reconstruit par le bailleur grâce aux indemnités de l’assurance contractée par le preneur. Le bail à ferme ayant été ensuite résilié, le preneur sortant sollicite du propriétaire-bailleur le paiement d’une indemnité de sortie.
Cette demande est rejetée en juridiction d’appel. Au soutien de leur décision, les juges du second degré retiennent que le preneur n’a pas participé, même indirectement, au financement de la reconstruction du bâtiment d’habitation par le paiement des primes d’assurance ayant permis au bailleur de percevoir l’indemnité due par l’assureur en raison du sinistre survenu dans ce bâtiment.
Ainsi motivée, cette décision s’exposait à la censure. La Cour de cassation la prononce effectivement, pour violation de la loi, sur le visa des articles L. 411-30, III, et L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime. Les Hauts magistrats reprochent en effet à la cour d’appel d’avoir ainsi statué alors que le preneur qui participe au financement des dépenses de reconstruction a droit à une indemnité égale au coût des travaux évalué à la date de l’expiration du bail, réduit de 6 % par année écoulée depuis leur exécution.
Référence : Cass. 3e civ., 5 nov. 2015, n° 14-23.875, n° 1219 P + B
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