Le droit commun du gage est applicable au warrant agricole. Ceci est réaffirmé par la Cour de cassation qui tire toutes les conséquences de la nature de gage du warrant agricole en retenant qu’il puisse, comme un gage de droit commun, porter sur des récoltes futures (C. civ., art. 2333).

Les faits

Une société conclut un contrat de vente pluriannuel avec une SCEA et lui consent des avances de trésorerie. Ces avances n’étant pas remboursées, la société délivre le 31 juillet 2012 un procès-verbal de saisie-vente de récolte sur pied. La SCEA fait opposition-jonction à la saisie-vente. Elle soutient que la récolte 2012 ainsi que celles à venir ont fait l’objet d’un warrant agricole consenti le 26 juillet 2012 au profit d’une société coopérative . Chacune des parties se pourvoit en justice, la SCEA pour faire annuler le procès-verbal de saisie-vente et la société pour faire annuler le warrant agricole.

La cour d’appel n’annule pas le warrant

Deux articles, l’article L. 342-1 du code rural et de la pêche maritime et l’article 1129 du code civil motivent sa décision. L’article L. 342-1, qui dresse la liste des biens susceptibles d’être warrantés, mentionne les « récoltes pendantes par les racines et les fruits non encore recueillis« .

L’article 1129 est relatif à la détermination de l’objet de l’obligation. Il précise qu’il porte sur une chose au moins déterminée quant à son espèce et si sa quotité est incertaine, elle doit être déterminable. Pour les juges d’appel, aucun de ces articles ne s’oppose à ce qu’un warrant soit délivré sur les récoltes pendantes par les racines, c’est-à-dire la récolte en cours et les suivantes.

Après la cour d’appel, la cassation

En cassation, la société soutient que le warrant agricole ne peut être inscrit que sur les biens limitativement énoncés par l’article L. 342-1 du code rural et de la pêche maritime. S’il peut être inscrit sur les récoltes sur pied et les fruits non encore recueillis, c’est-à-dire la prochaine récolte, il ne peut l’être sur les récoltes futures.

Le pourvoi est rejeté, mais pour valider le warrant agricole, la première chambre civile substitue aux motifs critiqués de la cour d’appel, un motif de pur droit. Elle vise l’article 2333 du code civil. Selon ce texte, le gage est une convention par laquelle le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs.

Il s’ensuit que le warrant agricole, dont le régime n’exclut pas qu’il puisse concerner des biens mobiliers corporels futurs, peut non seulement porter sur les récoltes pendantes par les racines, conformément à l’article L. 342-1 du code rural et de la pêche maritime, mais également sur les récoltes futures, en application du droit commun du gage.

Cass. 1re civ., 12 nov. 2015, n° 14-23.106, n° 1241 P + B