Non port des équipements de protection individuelle (EPI) par le travailleur : qui est responsable en cas d’accident ?
Obligations de l’employeur
L’employeur, a une obligation générale de sécurité à l’égard de ses salariés. Il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses travailleurs. Ces mesures comprennent notamment :
- des actions de prévention des risques professionnels,
- des actions d’information et de formation,
- la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés (C. du travail, art. L. 4121-1).
Les équipements de protection individuelle (EPI)
L’article R4321-4 du Code du Travail, stipule que « L’employeur met à la disposition des travailleurs, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés et, lorsque le caractère particulièrement insalubre ou salissant des travaux l’exige, les vêtements de travail appropriés. Il veille à leur utilisation effective. »
D’après les principes généraux de prévention tirés des articles L. 4121-1 à L. 4121-5 du Code du travail, l’employeur a une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés.
Ainsi, si à l’issue de l’analyse de sécurité sur un poste de travail, un EPI est rendu obligatoire, l’employeur doit :
- mettre à disposition l’EPI adéquat aux salariés concernés,
- informer les salariés concernés sur l’obligation de port effectif de ces équipements par le biais du règlement intérieur ou de consignes écrites portées à l’attention du personnel concerné,
- s’assurer auprès de ces mêmes personnes que l’équipement est effectivement porté,
- informer les salariés sur les sanctions dont ils sont passibles en cas de non-observation de ces obligations.
Exemple : pour la simple utilisation de chaussures de sécurité ou de gants, l’employeur doit définir les consignes de sécurité et organiser une formation.
Un défaut de formation ou d’information du salarié pourrait contribuer à diminuer la responsabilité de celui-ci en cas de manquement. A contrario, si l’employeur met tout en œuvre pour garantir la sécurité, le manquement d’un salarié à son obligation constitue une faute susceptible d’être sanctionnée.
Illustration par cet arrêt de la cour de cassation du 25 février 2014 : Faute de l’employeur retenue pour le non port d’EPI par un salarié.
Rappel des faits : La situation était une chute de hauteur de 12 mètres d’un salarié, résultant de l’absence combinée de protections collectives (car retirées temporairement) et individuelles (car non portées et de plus en nombre insuffisant). L’employeur tenta alors un pourvoi en cassation, afin d’écarter sa responsabilité compte tenu du fait que l’agent « avait sciemment refusé d’utiliser les baudriers de sécurité ». Pour ce faire, la cour de cassation rappela à l’employeur qu’« il appartenait à l’employeur de prévoir des moyens de sécurité compensatoires tels que des harnais anti-chute et qu’il lui incombait de s’assurer que les salariés concernés se munissaient effectivement de tels équipements, sans laisser à leur appréciation l’opportunité de le faire ». L’employeur a été condamné à une amende de 80 000 euros pour blessures involontaires et infractions à la sécurité des travailleurs. La cour de cassation a statué que lorsque l’employeur n’a pas veillé à la constante application des règles de sécurité il ne peut pas se prévaloir d’une faute exclusive de la victime.
L’arrêt de la cour de cassation rappelle l’article R4321-4 du Code du Travail et que la décision de non-port des EPI par les salariés demeure bien le problème de l’employeur, et qu’il doit donc veiller à l’utilisation des EPI !
Obligations des salariés
Les salariés ont également des obligations en matière de santé et sécurité au travail (Art. L4122-1 du Cdu travail) : « Chaque salarié doit prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé, ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail ».
Cette obligation implique notamment qu’il :
- utilise correctement les machines, appareils, outils, véhicules et dispositifs de sécurité, qu’il ne doit ni modifier, ni mettre hors service,
- porte les équipements de protection, en respectant leur destination,
- alerte l’employeur de toute situation de travail présentant un risque de danger grave et imminent et de toute défectuosité des systèmes de protection.
Un salarié qui ne respecte pas les règles de sécurité, par exemple en cas de non port de ses protections (EPI), peut être sanctionné. Les sanctions peuvent aller du simple avertissement au licenciement disciplinaire suivant la gravité de la faute.
Exemple : le refus de porter un casque de sécurité ou tout équipement de protection obligatoire constitue un manquement à l’obligation générale de sécurité du salarié pouvant justifier un licenciement pour faute grave.
Attention ! Si le salarié n’a pas reçu la formation nécessaire, il peut s’exonérer de sa responsabilité (à condition de n’avoir commis aucune imprudence et d’avoir respecté les consignes de sécurité).
Rappel : Le salarié, qui a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, dispose d’un droit d’alerte et de retrait.
Contrôle et responsabilités de l’employeur
Les règles de sécurité dans l’entreprise peuvent être contrôlées par l’inspection du travail qui peut :
- dresser des procès-verbaux et mettre en demeure l’employeur en cas d’infraction,
- saisir le juge de référés en cas de risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur,
- prescrire toutes les mesures utiles et notamment, en cas de danger grave et imminent, l’arrêt temporaire des travaux sur certains chantiers.
En cas de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ; par exemple, la non mise à disposition des EPI rendus obligatoires par l’analyse au poste de travail (par inconscience, méconnaissance du danger ou prétextes de coûts, …), ou s’il n’informe pas les salariés sur l’obligation d’utiliser ces EPI :
- l’employeur engage sa responsabilité civile en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle du salarié,
- il est également passible de sanctions pénales (amendes et, dans certains cas, peines d’emprisonnement). Sa responsabilité pénale sera engagée pour manquement à une obligation de sécurité. Dans ce cas, le manquement à cette obligation de résultat en matière de protection du salarié pourra revêtir le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L. 452 du Code de la Sécurité sociale.
Cerfrance Alliance Centre accompagne les employeurs dans leur démarche de prévention des risques professionnels pour la réalisation et la mise à jour du Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Cette démarche permet à l’employeur d’identifier ses bonnes pratiques en matière de santé sécurité mais aussi de détecter les celles à risque et de déterminer des actions d’amélioration.
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