Cerfrance 2014-ES

A l’article 18 du Projet de loi de finances pour 2019, une déduction pour épargne de précaution remplacerait les déductions pour investissement et pour aléas.L’article 18 du projet prévoit de créer un dispositif unique de déduction pour épargne de précaution qui se substituerait aux déductions pour investissement (DPI) et pour aléas (DPA) prévues par les articles 72 D et 72 D bis du CGI, lesquelles seraient supprimées.

Bien que largement inspiré de la DPA actuelle, le dispositif envisagé devrait être plus souple et plus attractif. Les exploitants agricoles soumis à un régime réel d’imposition pourraient déduire un montant plus important. Toutefois, le bénéfice de la déduction serait subordonné au respect du règlement européen de minimis. Par ailleurs, les sommes déduites seraient utilisées sans condition particulière sur une durée plus longue.

Objet de la déduction

Acquisition ou production de stocks de fourrage destiné à être consommé par les animaux de l’exploitation ou de stocks de produits ou d’animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an sans que ces coûts n’excèdent la somme inscrite sur le compte.

Le produit de la vente de ces stocks devrait être inscrit sur le compte selon de modalités précises sur lesquelles nous reviendrons au moment de l’adoption définitive des textes.

Pour les exploitants, associés coopérateurs d’une société coopérative agricole, le compte pourrait être un compte courant d’associé retraçant les sommes qu’il met à la disposition de la coopérative en cas de contrat pluriannuel conclu avec cette dernière prévoyant que le prix de vente de ses matières premières à la coopérative dépasse le prix de référence prévu par le contrat (contrat mettant en œuvre un mécanisme de lissage des prix).

Constitution d’une épargne professionnelle

Le bénéfice de la déduction pour épargne de précaution serait subordonné à la constitution d’une épargne professionnelle dans des conditions proches de celles prévues pour la DPA.

Ainsi, la déduction pour épargne de précaution pourrait être exercée à condition d’inscrire une somme comprise entre 50 % et 100 % de son montant à un compte ouvert auprès d’un établissement de crédit dans les six mois de la date de clôture de l’exercice au titre duquel la déduction est pratiquée et au plus tard à la date de dépôt de la déclaration des résultats de cet exercice.

L’épargne professionnelle ainsi constituée devrait aussi être inscrite à l’actif du bilan. Le montant total de l’épargne ainsi constituée devrait être à tout moment au moins égal à 50 % du montant des déductions non encore rapportées sans jamais excéder le montant de ces déductions. Le compte bancaire retracerait exclusivement les opérations afférentes aux sommes épargnées dans le cadre de la déduction pour épargne de précaution.

Montant de la déduction

Le montant de la déduction pour épargne de précaution serait, comme actuellement, plafonné, par exercice de douze mois, mais serait fonction du montant du bénéfice imposable. Elle serait ainsi égale :

  • au montant du bénéfice imposable lorsqu’il est inférieur à 27 000 € ;
  • à 27 000 € majorés de 30 % du bénéfice excédant cette limite, lorsqu’il est supérieur ou égal à 27 000 € et inférieur à 50 000 € ;
  • à 33 900 € majorés de 20 % du bénéfice excédant 50 000 €, lorsqu’il est supérieur ou égal à 50 000 € et inférieur à 75 000 € ;
  • à 38 900 € majorés de 10 % du bénéfice excédant 75 000 €, lorsqu’il est supérieur ou égal à 75 000 € et inférieur à 100 000 € ;
  • à 41 400 €, lorsque le bénéfice imposable est supérieur à 100 000 €.

Pour les Gaec et les EARL n’ayant pas opté pour l’impôt sur les sociétés, les plafonds mentionnés ci-dessus seraient, comme dans le régime actuel, multipliés par le nombre d’associés exploitants, dans la limite de quatre.

Pour déterminer la limite annuelle de déduction, il conviendrait aussi de tenir compte des déductions antérieurement pratiquées et non encore rapportées au résultat, comme dans le régime actuel. La présente mesure prévoit à cet effet que la déduction serait également plafonnée pour les exploitants individuels à la différence positive entre 150 000 € et le montant des déductions pratiquées et non encore rapportées au résultat. Pour les Gaec et les EARL, la somme de 150 000 € serait multipliée par le nombre d’associés exploitants, dans la limite de quatre.

Le plafond annuel de déduction serait égal au plus faible de ces deux montants.

Utilisation et réintégration de la déduction

La déduction devrait être utilisée au cours des dix exercices suivant celui de sa réalisation (au lieu de sept exercices actuellement) pour faire face à des dépenses nécessitées par l’exercice de l’activité professionnelle. Les conditions d’utilisation ne seraient pas limitativement énumérées et seraient ainsi moins contraignantes que dans le dispositif actuel.

La déduction serait rapportée au résultat de l’exercice au cours duquel elle est utilisée ou de l’exercice suivant. La déduction non utilisée dans le délai des dix exercices serait rapportée au résultat du dixième exercice suivant celui au titre duquel elle a été pratiquée.

L’exonération des plus-values professionnelles en fonction des recettes (1) ne serait pas applicable aux plus-values de cession de matériels roulants acquis au cours d’un exercice au titre duquel la déduction a été rapportée et dans les deux ans précédant leur cession.

A noter

Comme dans le régime actuel, la transmission à titre gratuit ou l’apport en société d’une exploitation individuelle dans les conditions prévues à l’article 41 ou 151 octies, I du CGI ne seraient pas considérés comme une cessation d’activité entraînant la réintégration des déductions pratiquées si les bénéficiaires de la transmission ou de l’apport remplissent les conditions ouvrant droit à la déduction et s’engagent à utiliser celle-ci au cours des dix exercices suivant celui au titre duquel elle a été pratiquée.

Déduction pratiquée après tout abattement

La déduction pour épargne de précaution serait pratiquée après les abattements prévus notamment l’abattement en faveur des jeunes agriculteurs (CGI art. 73 B).

Date d’entrée en vigueur

La mesure s’appliquerait aux exercices clos entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2022.

Les sommes déduites et les intérêts capitalisés non encore rapportées à la clôture du dernier exercice clos avant le 1er janvier 2019 seraient utilisées et réintégrées conformément aux modalités actuellement prévues par ces deux dispositions.

(1) CGI art. 151 septies